L’armateur qui veut bousculer le transport maritime dans la Caraïbe !

Jean-Stéphane Roul

CO-FONDATEUR DE KARIBSLINK

 

L’armateur qui veut bousculer le transport maritime dans la Caraïbe !

 

Après avoir navigué sur les cinq Océans et travaillé vingt-huit ans pour les plus grandes multinationales du transport maritime, Jean-Stéphane Roul a choisi de mettre ses compétences au service de sa région natale. Il a créé sa propre compagnie maritime “Karibslink”.

Son objectif : interconnecter les îles “à moindre coût”.

Une révolution pour la Caraïbe !

 

L’homme ne paie de mine. Chemise bleue casual, ton sérieux, poignée de main ferme, mais dans son attaché-case se trouve un projet colossal : doter les iles de la Caraïbe de leur propre réseau maritime de cabotage de marchandises , adapté à leur réalité économique … “Nos régions sont des paradis , on doit y vivre bien” martèle Jean-Stéphane. A 48 ans, ce capitaine de la marine marchande, fils de pêcheur schoelcherois, a tout quitté pour revenir aux Antilles. Il le confie lui-même, “j’avais la vie du prince de Bel-air”. En effet, titulaire d’un brevet de capitaine de 1ère classe de la navigation maritime, Jean-Stéphane a sillonné les océans à bord de Green Trankers ou encore de Bergesen avant de rejoindre en 2005 le service “Opérations maritimes” du groupe Total. Après avoir fait ses preuves, il est nommé quelques années plus tard directeur des “Opérations de la division trading shipping” pour le continent américain à Houston aux Etats -Unis. Une belle consécration.

 

Mais au fil des ans, l’expérience et le confort ne suffisent pas à faire taire l’entrepreneur qui sommeille en lui. “Je viens d’une très grande structure, cependant au bout d’un moment on atteint le plafond de verre. Et puis, on se demande si ça a du sens ce qu’on fait dans ces très grands groupes…” confie-t-il. Il l’avoue : “J’avais envie d’être utile chez moi”. Nous sommes en pleine période de bouleversements planétaires , la Covid-19 vient de mettre le Monde sur pause, et de rebattre les cartes de nos priorités. Le 15 mai 2020, Jean-Stéphane atteint son “point de nonretour”.

Il choisit de quitter Genève, avec son projet dans les valises.

 

« Vous ne pouvez pas adapter un modèle de multinationale ou continental à des régions insulaires, elles ne sont pas capables de suivre ce rythme-là ».

Son constat est simple, les multinationales qui opèrent dans la zone Antilles pourraient mieux faire, largement mieux faire. “Quand on est au coeur de la bête, on voit la limite des modèles économiques de ces grands groupes. Ils n’ont pas forcément les outils adaptés pour être efficients dans des territoires comme les nôtres. Vous avez du carburant brûlé pour rien, de l’argent qui part en fumée”,

assure-t-il. “Dans une logique maritime, nos territoires représentent de très petits marchés, avec un nombre limité d’habitants, qui disposent de moyens financiers relativement limités. Vous ne pouvez pas adapter un modèle de multinationale ou continental à des régions insulaires , elles ne sont pas capables de suivre ce rythme-là”.

 

Pour pallier les carences de ces modèles qui engendrent des surcoûts, et qui impactent in fine les populations, il conçoit un projet hors-norme : construire une nouvelle génération de navires dédiée aux eaux de la Caraïbe. Plus petits, plus écologiques, plus rapides, ils sont capables de naviguer “partout grâce leur faible tirant d’eau”. Un changement de paradigme dans le monde bien établi du business maritime. “Certes nous sommes français, mais nous sommes situés dans une région géographique, on devrait se tourner vers nos voisins avant de regarder à 8 000 km. On a déjà beaucoup de solutions en local” considère-t-il.

 

Prévu à l’horizon 2025, Karibslink est en phase d’amorçage. Plus de 20 millions d’euros au total sont nécessaires à son déploiement. “Ce sont des projets structurants donc il faut convaincre à la fois les investisseurs privés , politiques nationaux et décideurs locaux et régionaux. C’est tout un challenge !” ne cache pas Jean-Stéphane. Mais pour lui, l’urgence de changer de modèle se fait pressante.

By audrey

23 juin 2023

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